Aujourd'hui j'ai assisté au conseil de quartier

Dans la salle comble, les quelques jeunes détonnaient au milieu des cheveux blancs ou gris. Partout des embrassades, des salutations, des tapes dans le dos. Ce sont les vieux Bastidiens, m'a glissé ma voisine, l'oeil mutin : une vraie mafia ! Tout le monde s'installait peu à peu, une table en U centrale curieusement occupée en vis à vis comme aux mariages, plusieurs rangées de sièges en complément de chaque côté. Les élus et les agents municipaux sont arrivés en groupe, les hommes avec leur façon lisse de porter le costard, les femmes le mollet ferme, corsetées dans des petits ensembles pimpants. Chers Bastidiens, chères Bastidiennes, bonjour ! a lancé Alain Juppé. Il a expliqué le nouveau rôle des mairies de quartier et donné des nouvelles de gros dossiers avant de passer la parole à Muriel Parcelier, adjoint et maire de quartier. Un monsieur vindicatif a ouvert le feu des questions diverses en s'emportant contre le stationnement dans le quartier, qu'il juge anarchique. Le sujet a tenu la salle en haleine presque une heure. Le droit qu'ont -ou non- les prostituées de laisser leurs camionnettes le long d'une avenue a fait l'objet de débats vaguement égrillards. Il restait peu de temps, même si la réunion a largement débordé des contours qui lui étaient fixés, pour des échanges sur les prochains chantiers. Ma voisine continuait de se tourner vers moi avec des commentaires et des questions; le lieu étant bruyant je ne comprenais rien et me contentais de hocher la tête en souriant d'un air que j'espérais intéressé. Je regardais autour de moi, fascinée. Il me semblait que j'avais trouvé quelque chose.