Encore un chien ? Oui. Ce matin je pars travailler chez
B qui habite dans les Landes. Jolie route feutrée de givre. Devant la maison basse
posée au milieu des pins un immense chien vient m’accueillir, je le connais, il
a l’air rudement content de me voir, fête. A l’intérieur c’est un tout autre
format qui gambade autour de B et vient me renifler (mes bas de pantalon,
senteurs exquises, font son bonheur un très long moment). Léon appartient à la
famille des bassets poilus (je ne suis pas sûre que cette appellation soit
homologuée), il a 13 ans et souffre d’un glaucome. Cela ne l’empêche pas de
frétiller. Nous commençons à bosser et Léon, après quelques
hésitations, choisit un fauteuil sur lequel il se renverse toutes pattes en
l’air, et s’endort. Deux heures durant on n’entend plus parler de lui. Il
change parfois de position, paupières soigneusement fermées, tout à ses rêves
canins. Mais voilà que B m’initie aux mystères du management des équipes autonomes
et cite le récent entretien de Crozier et Tilliette. Au moment précis où elle
prononce le nom « Crozier », le chien ouvre un œil, se redresse, et
affichant un air de profond intérêt, se jette hors du siège et accourt vers
nous, soucieux de participer à la conversation. Nous avons quelque mal à
comprendre son intervention, mais puisque B pratique la sociologie de la
traduction, je suis confiante, cela viendra.