Aujourd'hui j'ai risqué ma vie
Un déjeuner, seule, sur une place non loin de l'entreprise. Cette brasserie, que je n'ai jamais essayée, a installé une vingtaine de tables sur le trottoir. Pas hyper bucolique, mais le soleil est toujours bon à prendre. J'attends 40 minutes avant de voir enfin arriver une salade au chèvre chaud qui, pour 8,90 euros, est constituée de salade verte, 10 g de carotte râpée sous vide, le quart d'une tomate, et quatre malheureux et minuscules toasts très gras décorés d'une ridicule rondelle d'un mauvais chèvre. Je renonce au café puisque le serveur ne réapparaît pas. J'ai entendu le fantôme en question dire un peu plus tôt à mes voisins qu'il ne donne pas de note et qu'il faut aller payer à la caisse, aussi je vais jusqu'à la brasserie. Derrière sa caisse, un homme mal aimable jette à un client docile "J'ai besoin du numéro de votre table, allez voir ce que c'est". Son regard me confirme que je suis tombée au mauvais endroit, et lorsqu'il m'aboie la même chose (alors même que je lui explique ce que j'ai consommé) je rentre en résistance "Je n'irai pas, ce n'est pas à moi d'y aller". "Ah, c'est à moi peut-être ?" me rétorque-t-il comme s'il voulait m'arracher les yeux. "Vous pourriez vous organiser, ce système est ridicule". J'ai parlé calmement et je crois bien que je m'amuse. Et comme il semble vouloir me faire attendre en signe de répression je fais remarquer "Je peux partir sans payer, cela ne me gêne aucunement étant donné la qualité de ce que j'ai mangé". Et là, tandis que oui, décidément, je m'amuse, je lis dans ses yeux que s'il le pouvait, il m'écrabouillerait comme un cafard.